« Ayez pitié de moi, ayez pitié de moi, vous du moins, mes amis, car la main de Dieu m’a frappé. Pourquoi vous acharner contre moi, comme Dieu lui-même ? Ne serez-vous jamais rassasiés de me mordre ? »

Job 19, 21-27

Le livre de Job est pathétique d’un bout à l’autre, tellement il nous met en face de la souffrance, de son mystère, de son caractère intolérable, et de la façon souvent misérable avec laquelle nous accompagnons ceux qui la subissent. Depuis le début, Job se débat avec lui-même et avec Dieu, et avec ses amis. Avec lui-même, car il n’accepte pas l’idée que ce soit ses fautes – quelles fautes ? – qui lui valent tant de souffrance. Avec Dieu  parce qu’il ne comprend pas comment Dieu agit avec lui, et pourquoi il est sourd à ses appels au secours. Avec ses amis qui ne cessent de le culpabiliser par leurs sermons incessants.

Ici, Job reconnait que Dieu ne peut pas être étranger à son malheur, puisque rien, selon lui et les gens de son temps, n’échappe à la toute-puissance de Dieu. Et cela, d’ailleurs, il a raison. Nous croyons nous aussi, que rien n’échappe à sa puissance. Nous refusons de croire que le malheur soit automatiquement une punition. Nous savons que les conséquences de certains actes mauvais sont mauvaises aussi, mais nous savons – quel mystère – que même les justes souffrent.  Et cependant, nous croyons que Dieu, qui sait tout, permet, d’une certaine manière, mystérieuse, le mal qui nous atteint parfois ; sans doute ne le veut-il pas directement, mais il ne l’empêche pas toujours, alors qu’il en a certainement le pouvoir. Pourquoi ? La Foi seule trouve la réponse.

Ce que Job demande, c’est que ses amis n’en rajoutent pas ! Qu’ils se taisent ! Que leur compassion soit réelle ! Ils n’ont pas besoin de se faire les censeurs d’un être blessé au plus profond de lui. Ils n’en savent pas plus que lui, ils n’ont pas besoin augmenter encore le malheur par leurs propos importuns.

Seigneur Jésus, toi qui connais le prix de la souffrance, ne permets pas que nous soyons un poids supplémentaire pour ceux qui en sont les victimes. Tu nous as placés près d’eux pour alléger leur peine, leur dire ta présence, porter avec eux le poids du malheur, afin qu’il soit plus léger sur leurs épaules ; apprends-nous ta compassion pour les malades et ceux qui sont dans la peine.

† Emmanuel Lafont

Evêque de Cayenne