Donnez-leur vous-mêmes à manger

« Ses disciples disaient : ‘L’endroit est désert et déjà l’heure est tardive. Renvoie-les : qu’ils aillent dans les campagnes et les villages des  environs s’acheter de quoi manger.’ Jésus leur répondit : ‘Donnez-leur vous-mêmes à manger.’ »

Marc 6,34-44.

 

L’épisode de la multiplication des pains est raconté six fois dans les Evangiles ! Deux fois en Marc et en Matthieu, une fois en Luc et en Jean. Il était régulièrement utilisé par l’Eglise primitive, et nous comprenons pourquoi : d’une part il manifeste la profonde compassion de Jésus pour l’humanité souffrante ; d’autre part, il est devenu une leçon de catéchisme pour introduire au plus grand miracle de Jésus : transformer du pain et du vin en son corps et en son sang, comme nourriture offerte à tous, surabondamment, jusqu’à la fin du monde !

 

La compassion de Jésus ! Il est remué jusqu’aux entrailles, en voyant cette foule errant comme des brebis sans berger. Dans la langue de son temps, berger veut dire : « chefs du peuple », il s’agit des responsables politiques et religieux, de ces bergers dont parlait Ezéchiel en disant : « Ils prennent soin d’eux-mêmes ! N’est-ce pas du troupeau que le berger prend soin ? Vous vous nourrissez du lait, vous vous habillez de la laine, vous sacrifiez les bêtes grasses, mais vous ne prenez pas soin des brebis. Vous n’avez pas raffermi la brebis épuisée, vous n’avez pas soigné celle qui était malade, ni pansé celle qui était blessée, vous n’avez pas ramené la brebis égarée, et pas même cherché celle qui était perdue. Quant à celles qui étaient fortes, vous les avez menées par la terreur » (Ezéchiel 34,3-4).

 

Le miracle de la multiplication : Jésus, par ce miracle, fait passer les disciples de l’économie de marché à l’économie de la solidarité et du partage. Eux voulaient que le maître renvoie la foule pour que chacun se débrouille. Lui sait que si chacun apporte sa part, tous pourront manger à sassiété. Si tu partages le peu que tu possèdes, tu verras que Dieu multipliera pour toi tes biens et ta vie tout entière.

 

Ce miracle annonce l’Eucharistie : il n’en manquera jamais, jusqu’à la fin du monde ! Elle est pour tous. A nous de faire que les gens s’en approchent avec gratitude, reconnaissance, et un désir sincère de se laisser conduire par l’Esprit de Jésus.

 

Seigneur Jésus, donne-moi cette compassion qui te faisait si proche de tous ! Et donne-moi ce goût du partage dans lequel, je le sais, je recevrai cent fois plus que ce que j’aurai pu offrir !

 

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane