J’étais comme un agneau qu’on mène à l’abattoir

« Seigneur, tu m’as fait savoir, et maintenant je sais, tu m’as fait voir leurs manœuvres. Moi, j’étais comme un agneau docile qu’on emmène à l’abattoir,
et je ne savais pas qu’ils montaient un complot contre moi.
Ils disaient : ‘Coupons l’arbre à la racine, retranchons- le de la terre des vivants »

Jérémie 11,18-20.

 

Le prophète Jérémie fait face, comme Jésus plus tard, à des adversaires déterminés à le faire périr. Il n’a pourtant fait qu’obéir à son Dieu, et proclamer ce que Dieu lui demandait de proclamer ; il avait été envoyé pour « pour déraciner et renverser, pour exterminer et détruire, pour bâtir et pour planter ». Ce n’était pas une mission facile, en effet. Il avait accompli sa mission comme un agneau docile.

La situation de Jérémie préfigure celle de Jésus, qui va se trouver dans une situation identique : l’Evangile de ce jour nous rapporte la fureur des grands prêtres et des pharisiens, parce que les gardes n’aient obéi à leurs ordre d’arrêter Jésus : « Alors, vous aussi, vous vous êtes laissé égarer ? Parmi les chefs du peuple et les pharisiens, y en a-t-il un seul qui ait cru en lui ? Quant à cette foule qui ne sait rien de la Loi, ce sont des maudits ! » (cf. Jean 7,40-53).

Il y a deux raisons au l’attitude de ceux qui complotent contre Jérémie et Jésus : la première, c’est la refus de changer leur vie pour éradiquer ce qui est mal : Jérémie, comme Jésus, demande la fidélité à l’Alliance, ce qui implique de respecter la loi de Dieu, d’être juste, droit, honnête, pur et miséricordieux. Inutile de pratiquer les rites de prières si le reste de la vie n’est pas conforme à ce que Dieu demande.

La deuxième raison tient dans les préjugés contre celui qui parle : parce que Jérémie ne fait pas partie du cercle des prêtres, parce que Jésus est galiléen, alors leur parole ne vaudrait rien ! Il aurait fallu qu’il soient de Jérusalem, qu’ils appartiennent à leur sérail, prétendent leurs adversaires… Ils ne veulent rien savoir, en raison de leurs préjugés qui ont quelque chose d’un certain racisme : l’étranger a toujours tort.

Jérémie annonçait l’invasion de Babylone. Jésus annonçait la destruction du temple. Les deux savaient que désobéir à la loi ne peut que conduire à des catastrophes. Ne sommes-nous pas devant une expérience semblable ? Nous avons rejeté Dieu, ou si nous l’avons gardé, nous avons rejeté ses commandements. Nous avons désobéi en beaucoup de points, ressemblant au monde qui nous entoure, mettant notre bonheur dans l’argent et l’égoïsme. Nous n’avons pas respecté la nature. Aujourd’hui, elle se rebelle contre nous sous la forme d’un virus étonnant de puissance destructrice.

Seigneur Jésus, garde-moi des préjugés, et en ce temps de carême, donne-moi, par ton Esprit Saint, de savoir discerner ceux qui m’habitent et avec ta grâce, permets que je m’en débarrasse. Fais que j’écoute avec le cœur l’appel à la conversion que tu me lances aujourd’hui et j’attendrai ton salut dans la confiance et l’humilité du cœur.

† Emmanuel Lafont

Evêque de la Guyane